• Pourquoi ce site ?

    Il y a plusieurs décennies que j'ai découvert et lu avec grand intérêt le livre de Louis Arnould "Ames en prison", qui rapporte l'apprentissage de plusieurs sourdes-aveugles - dont en particulier Marie Heurtin - à l'institution de Larnay, près de Poitiers, au début du XXe siècle.

    Dès que j'ai pu, et à défaut de mieux, j'ai placé sur Scribd une recension de cet ouvrage, parue en 1911. C'était bien peu, j'en conviens.

    En 2013,  un des sujets du Bac de Philo était : "Le langage n'est-il qu'un outil ?".

    Posément, un philosophe-en-(mauvaise)-herbe explique que :

    "la langue des signes ne permet en fait que d'exprimer des besoins vitaux, basiques, mais pas d'accéder à un langage conceptuel, ni même de tenir une banale conversation courante, un peu comme les cris des animaux".

    Surpris mais aussi agacé et même meurtri par la bêtise du propos du bachelier-en-devenir, je me lançais dans une nouvelle recherche, et eu la bonne fortune de parvenir enfin à récupérer (quoique difficilement) l'édition de 1904 de "Une âme en prison" d'Arnould (ouvrage qui allait devenir "Ames en prison"). De ce livre, je pus extraire ce qui concernait directement Marie Heurtin, et que je plaçais sur internet sous le titre

    "Marie Heurtin, ou l'accès à la communication d'une sourde muette aveugle".

    En 2014 sortit le film "Marie Heurtin" de Jean-Pierre Améris avec Isabelle Carré - dans le rôle de "Soeur Marguerite" - et Ariana Rivoire dans celui de Marie Heurtin.

    Malgré une réussite technique incontestable, ce film me laissa avec une forme d'insatisfaction : dans ce magnifique hymne humaniste, j'ai surtout vu une sorte de rousseauiste "éducation d'un bon sauvage" : il y a certes l'évolution psychologique et intellectuelle de la jeune Marie, mais où se trouve l'âme, cette âme que la soeur Marguerite a sorti de sa "prison" ? Et c'est précisément ça qui m'a gêné. Car ce n'est pas quelque théoricien de l'humanisme  des Lumières, disciple de Voltaire ou de Rousseau qui a fondé l'institution de Larnay, mais un brave abbé.

    Et celles qui s'occupaient jour et nuit des jeunes filles qui leur sont confiées, n'étaient pas des "philosophes", ni même des éducatrices au sens moderne du mot, mais bel et bien des "bonnes soeurs" qui partageaient leur vie entre la prière et l'action, selon la formule classique "Ora et Labora" ; comme aussi c'est un pasteur protestant du nom de John Bost qui fonda les asiles pour "idiots" à La Force, en Dordogne.

    Or, deux jours seulement après avoir vu le film, je trouvais sur internet une version numérisée de la 20ème édition (1934) de "Ames en prison". Je disposais donc (avec en outre mon édition "papier" de 1942) des matériaux nécessaires pour rendre plus accessible encore ce que le film avait voulu faire connaître.

    Que l'on ne se méprenne pas, ce site n'est pas une "réponse" au film de J.-P. Améris (qui mérite louanges et reconnaissance pour avoir osé faire un tel film), mais bien plutôt un nécessaire complément, afin de restituer une image la plus authentique possible de ce que fut cette extraordinaire aventure.

    Ajoutons enfin que deux jours plus tard encore, je fus mis en contact avec un "presque voisin" (nous habitons à moins de trente kms) qui se trouve être le petit-fils de Louis Arnould, et par qui j'ai pu avoir quelques informations plus directes, et les photos de M. Arnould.

    Albocicade

    Décembre 2014